Pyrèthre : l’arnaque ou pas ?

On utilise souvent le terme pyrèthre, pyrèthre naturel ou encore fleur de pyrèthre. Dans l’imaginaire collectif, on fait alors référence à un insecticide naturel dérivé des fleurs de certaines espèces de chrysanthèmes. Qu’en est-il vraiment ? Et à ce propos, quelle différence y a-t-il entre un insecticide naturel et un insecticide synthétique ? Les alternatives à base de plantes sont-elles vraiment efficaces ou a-t-on affaire à du greenwashing ?

Le pyrèthre naturel : qu’est-ce que c’est ?

Le pyrèthre désigne plusieurs espèces de plantes appartenant aux genres Tanacetum et Anacyclus. Ces fleurs contiennent des composés chimiques efficaces pour repousser ou tuer les insectes. Par association d’idées donc, on dit pyrèthre pour désigner en fait les pyréthrines extraites du pyrèthre de Dalmatie (Tanacetum cinerariifolium).

Car le pyrèthre ne contient pas une mais six pyréthrines, soit six composés chimiques actifs différents. Ce sont elles qui sont responsables de l’action insecticide du pyrèthre. Elles agissent en perturbant le système nerveux des insectes, ce qui les rend incapables de bouger et les tue finalement. Et on les utilise depuis des siècles comme insecticide naturel pour protéger les cultures, les animaux domestiques et les humains contre les insectes nuisibles.

On utilise les pyréthrines dans des formulations d’insecticides. Les insecticides à base de pyréthrine sont considérés comme plus écologiques et moins nocifs pour l’environnement et les humains que les insecticides synthétiques. Cependant, ils présentent tout de même des risques pour certaines espèces non ciblées, comme les abeilles et les poissons.

Pyréthrines naturelles vs pyréthrines synthétiques

Attention de ne pas confondre les pyréthrines avec les pyréthrinoïdes. Les pyréthrinoïdes sont des pyréthrines synthétiques qui imitent l’action des pyréthrines naturelles.

Comme les autres insecticides synthétiques, les pyréthrinoïdes sont généralement plus stables, plus puissants et ont une durée d’action plus longue que les pyréthrines naturelles. Mais ils peuvent aussi présenter des risques environnementaux et pour la santé humaine, selon leur emploi et leur concentration.

Qu’est-ce qu’un insecticide synthétique ?

Un insecticide synthétique est un composé chimique créé en laboratoire de manière artificielle. Il n’est donc généralement pas présent dans la nature. Outre les pyréthrinoïdes, il existe des organophosphorés ou encore des carbamates.

Ces produits chimiques agissent généralement :

• en perturbant le système nerveux des insectes,
• en affectant leur croissance,
• ou en interférant avec d’autres processus biologiques essentiels.

Pyrèthre naturel et adjuvants

Un insecticide végétal à base de pyrèthre n’est pas conçu de manière artificielle (synthétisé) en laboratoire. Toutefois, il peut être mélangé avec d’autres ingrédients, comme des synergistes, pour améliorer son efficacité et sa durée de vie. Dans ce cas, bien que le pyrèthre lui-même soit naturel, la formulation finale peut inclure des composants artificiels.

Insecticides à base de pyrèthre et réglementation

Les biocides sont soumis à la réglementation européenne sur les produits biocides qui établit les exigences pour la mise sur le marché et l’emploi de ces produits.

Les substances actives contenues dans les produits biocides doivent être approuvées au niveau européen. C’est le cas pour les pyréthrinoïdes ou tout autre substance active synthétique. Et c’est également le cas pour les pyréthrines et tout autre substance active à base de plante !

Une fois la substance active approuvée, les produits biocides contenant cette substance active doivent être autorisés au niveau national. En France, les produits biocides sont réglementés par l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES) et la Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes (DGCCRF).

Les solutions naturelles autres que le pyrèthre

Si vous cherchez des alternatives naturelles aux insecticides synthétiques, voici quelques solutions permettant de contrôler les insectes nuisibles :

• Bacillus thuringiensis (Bt) : il s’agit d’une bactérie naturelle qui produit des protéines toxiques pour certaines espèces d’insectes, comme les chenilles et les moustiques. Cette bactérie est spécifique et ne nuit pas aux insectes non-cibles
• La terre de diatomée est une poudre fine composée de fossiles de diatomées, des algues microscopiques. Elle agit mécaniquement en endommageant la couche protectrice externe des insectes, ce qui provoque leur déshydratation et leur mort. La terre de diatomée est efficace contre les insectes rampants (fourmis, blattes, puces, punaises de lit…).
• Certaines huiles essentielles ont des propriétés insecticides et répulsives naturelles. On les retrouve dans des produits comme des répulsifs contre les moustiques et les mouches.
• Les pièges à phéromones attirent les insectes nuisibles en utilisant des substances chimiques naturelles similaires aux phéromones produites par les insectes. Ces pièges sont spécifiques à certaines espèces d’insectes.
• Les nématodes sont des vers microscopiques qu’on peut utiliser pour lutter contre les insectes nuisibles, comme les larves de moustiques. Les nématodes bénéfiques permettent réduire les populations d’insectes nuisibles sans nuire à l’environnement.

Bien qu’il s’agisse d’alternatives naturelles aux produits synthétiques, il est important de suivre les instructions d’utilisation de ces produits. Il faut notamment prendre des précautions pour minimiser les impacts sur les organismes non ciblés et l’environnement.

Insecticides naturels : efficacité

Il est légitime de se demander si les insecticides naturels sont aussi efficaces que les formulations synthétiques. Notons que l’efficacité d’un insecticide ne dépend pas seulement de sa nature (naturelle ou synthétique), mais aussi de son mode d’action et de sa bonne application. Ainsi, l’efficacité des produits naturels par rapport aux insecticides synthétiques dépend de plusieurs facteurs :

• la cible,
• la concentration du produit,
• les conditions environnementales,
• et la méthode d’application.

Dans certains cas, les insecticides naturels peuvent être moins efficaces que les insecticides synthétiques. En effet, ils peuvent se dégrader plus rapidement dans l’environnement et avoir une durée d’efficacité plus courte. Des applications plus fréquentes sont souvent nécessaires ou des concentrations plus élevées pour obtenir le même niveau de contrôle des organismes nuisibles.

Cependant, les biocides naturels présentent plusieurs avantages par rapport aux insecticides de synthèse :

• ils sont généralement moins toxiques pour les organismes non ciblés, tels que les pollinisateurs, les prédateurs naturels et les humains,
• ils ont souvent un impact environnemental moindre ;
• leur utilisation peut réduire le risque de développement de résistances chez les insectes nuisibles, un problème courant avec les produits de synthèse.

Si les insecticides synthétiques ont connu leur heure de gloire, les insecticides d’origine végétale préexistaient. Et on constate une tendance croissante à revenir à ces méthodes de lutte antiparasitaire plus naturelles. C’est vrai en agriculture biologique mais également dans la gestion intégrée des ravageurs et des nuisibles, au champ comme à la ville et au jardin comme à la maison.

Insecticide naturel et greenwashing : la question qui fâche

Le greenwashing est une pratique marketing qui consiste à donner une image faussement écologique à un produit ou à une entreprise. Pour éviter le greenwashing, les professionnels de la lutte antiparasitaire doivent choisir des produits et des fournisseurs réellement respectueux de l’environnement.

• Prenez le temps de mener des recherches sur les produits et les fournisseurs ; ne vous fiez pas uniquement aux déclarations marketing et aux allégations écologiques ; lisez les étiquettes, les fiches techniques et les informations sur les substances actives.
• Privilégiez les fournisseurs et fabricants qui sont transparents quant à leur chaîne d’approvisionnement, leurs processus de production et leurs impacts environnementaux ; les entreprises responsables partagent ces informations avec leurs clients.
• Formez-vous et informez-vous sur les enjeux environnementaux, les alternatives naturelles et les meilleures pratiques en matière de lutte antiparasitaire ; partagez ces connaissances.
• Soyez sceptique face aux allégations écologiques ; sachez que « la règlementation biocide interdit l’utilisation de certaines mentions telles que produit biocide à faible risque, non toxique, ne nuit pas à la santé, naturel, respectueux de l’environnement, respectueux des animaux, ou toutes autres indications similaires sur les étiquettes et dans les publicités » des produits biocides.
• Échangez avec d’autres professionnels de la lutte antiparasitaire et partagez vos expériences concernant les produits et les fournisseurs. Cela peut vous aider à identifier les produits réellement plus respectueux de l’environnement et à éviter les pièges du greenwashing.